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Un Ami Alsacien

Quasiment disparu d’Alsace en 1870, le castor alsacien fut chassé pour sa fourrure, les glandes de castoréum mais aussi parfois pour sa chair de piètre qualité (considérée comme une viande de paysan). Comme le castor est un animal aquatique et que sa queue présente des écailles les chrétiens considérèrent qu’il y avait un peu du poisson en lui et la consommation de sa queue fut autorisée le vendredi.


© Olivier Gutfreund

Classé espèce protégée en 1968, il a été réintroduit dans le Haut-Rhin sur la Doler en 1970 et 1971 puis en 1973, dans la forêt de Mackenheim et Artolsheim. Des lâchés ont aussi eu lieu dans l’Ill Wald de Sélestat par la suite. Aujourd’hui sa population semble en augmentation.


© Olivier Gutfreund

Le castor est un mammifère semi-aquatique avec beaucoup de caractéristiques physiques qui le rendent unique. Il a des paupières transparentes pour nager sous l’eau. Des valves bouchent ses oreilles et ses narines lorsqu’il plonge. Ses dents sont de véritables ciseaux à bois, elles s’aiguisent d’elles-mêmes et poussent toute sa vie. Sur chaque patte arrière il a une griffe fendue en deux qui lui sert de peigne pour faire sa toilette. Sa queue a plusieurs utilités : elle lui sert de gouvernail, d’appuis, de communication (il claque la queue violement sur l’eau pour prévenir d’un danger) et de réserve de graisse. Le Castor a un très bon odorat, ce que j’ai pu souvent constater lors de mes affûts. Il cherche les odeurs quand il nage en bougeant la tête de haut en bas. Gare aux vents contraires ! Votre présence le fera inévitablement plonger et disparaitre ! En plus de l’odorat, il a une très bonne ouïe et comme ses oreilles sont au-dessus de l’eau il est très à l’écoute des moindres bruits inquiétants. J’ai un jour oublié de couper la sonnerie de mon téléphone et ça n’a pas loupé, il est venu droit sur moi vérifier ce bruit sur son territoire. Pour ce qui est de la vue, notre ami n’est pas très bien équipé, mais de mon expérience, j’ai quand même l’impression qu’il connaît bien son territoire et repère des choses qui ne sont pas là habituellement comme un affut ou des filets. S’il ne discerne rien de dangereux il continuera à « vivre sa vie ». Au final, le castor est plutôt nocturne en Alsace, je dis bien en Alsace parce que dans certaines régions, il lui arrive de sortir en journée. Vous avez une chance de le voir tôt le matin et le soir.

© Olivier Gutfreund

Le Castor, quand on regarde bien, laisse beaucoup d’indices de présence. Le plus facile à trouver reste le crayon, cette découpe circulaire à coup de dents au pied de l’arbre, qui a pour but de le faire tomber (si possible dans l’eau) pour se délecter des feuilles et petites branches en hauteur. C'est un animal exclusivement végétarien, qui se nourrit au printemps et en été, de plantes herbacées, feuilles et rameaux. En hiver il ronge surtout les peupliers, saules et trembles. Il peut couper des arbres de 20 cm de diamètre et plus, mais il préfère ceux qui mesurent de 3 à 8 cm de diamètre et 30 cm de haut.

Autre indice de sa présence relativement visible : le « réfectoire ». Le castor a souvent des petites plages où il aime ramener sa nourriture et manger. N’aimant que grignoter l’écorce, il laisse les branches sur place que l'on retrouve au bord de l’eau, signe du dit « réfectoire » (plus il y a de branches plus il aime venir ici grignoter). Bien sûr, la Hutte est un énorme indice de présence mais le souci est qu'il n'en construit pas obligatoirement. Il lui arrive de creuser des « terriers » sous des arbres au bord de l’eau avec une entrée impérativement sous l’eau ce qui le rend souvent dur à trouver. Avec un peu d'expérience, on repère sa présence par des petits tas de mélange sable-terre-vase avec des racines ou autre graminée entrelacée et surtout très odorants ! Le Castor est très territorial, surtout le mâle qui chaque soir fait le tour de son territoire et marque par ci par là de son odeur « Castoréum ». Le castoréum est une sécrétion huileuse et odorante produite par des glandes spécifiques situées dans le cloaque de l’animal (près de l’anus). Pour ce faire il gratte le bord de l’eau, fait un petit tas et y dépose son Castoréum puis s’en va… Les autres mâles du coin n’ont qu’à bien se tenir… Le barrage est aussi un très bon indice de présence mais sur notre territoire il n’en fait pratiquement pas. Puis, viennent les coulées qui sont souvent les chemins empruntés par notre ami pour remonter dans les renouées ou autre saule… Parfois, ces coulées sont quasi verticales ! Tout simplement impressionnant ce qu’il peut arriver à monter !


© Olivier Gutfreund

Même si le castor est protégé et en bonne voie de repeuplement de nos rivières d’Alsace, rien n’est jamais définitif dès que l’homme est dans les parages. Il peut être piégé, empoisonné, se faire écraser quand il traverse les routes. Notre ami a aussi le tort de modifier son environnement par exemple en créant des barrages qui font monter le niveau de l’eau et inondent des prés environnants, ce qui aura tendance à ne pas plaire aux agriculteurs pour qui les fourrages sont importants aussi. La cohabitation n’est pas toujours cordiale mais grâce à des groupes d’études comme le GEPMA (Groupe d'étude et de protection des mammifères d'Alsace) notre ami est protégé des dérives de l’homme pour qui les amandes peuvent être salées s’il touche à un animal protégé.


© Olivier Gutfreund
 

Texte et photos : Olivier Gutfreund

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